« Je suis la résurrection et la vie »

En préparant cette homélie, une phrase d’une lecture de ce 5ème dimanche de Carême m’a particulièrement touché.

Cette phrase je l’ai souvent lue dans le passé, sans y porter une attention particulière.

Mais dans cette période de pandémie, elle a résonné en moi de façon toute spéciale.

M’apportant consolation, confiance et espérance.

Comme nous devons nous encourager les uns les autres, je vous livre cette phrase accompagnée de quelques commentaires.

Dans l’espérance qu’elle vous apporte à vous aussi la consolation dont vous avez besoin aujourd’hui.

Cette phrase vous l’avez entendue dans la première lecture tirée du livre d’Ézéchiel:

Ainsi parle le Seigneur Dieu : Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter, ô mon peuple.

Quand Ézéchiel reçoit cette parole de Dieu, il est en exil à Babylone, avec son peuple.

25 ans auparavant, il a été témoin de la prise de Jérusalem par les armées babyloniennes.

Il a vu le Temple profané et incendié.

Il a vu la ville pillée et ses remparts rasés.

Il a vu ses habitants se rassembler en longues files interminables et il est parti avec eux, là-bas vers l’est, vers Babylone pour un exil peut-être sans retour.

Ce jour-là le peuple d’Israël a tout perdu.

Son temple saint, sa ville sainte, sa Terre Sainte.

Mais Ézéchiel a vu autre chose.

Il a aussi vu la gloire de Dieu s’élever du milieu de la ville et partir vers l’orient. (Éz.11, 23).

Dieu n’abandonne pas son peuple dans son épreuve.

Dieu part lui aussi en exil avec son peuple.

Et Dieu fait à son peuple en exil une promesse :

Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter, ô mon peuple.

L’exil aura une fin.

Le peuple retrouvera un jour son temple saint, sa ville sainte, sa Terre Sainte.

Ce ne sera plus un peuple nombreux, orgueilleux et sûr de lui qui reviendra.

Ce sera un petit reste, éprouvé, émondé par l’Exil.

Mais affermi dans sa foi en Dieu.

Car en exil il aura fait l’expérience que Dieu était là, présent et fidèle.

Ainsi parle le Seigneur Dieu : Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter, ô mon peuple.

Dans l’évangile de ce dimanche, nous voyons en quelque sorte, cette promesse se réaliser.

Jésus est devant le tombeau fermé de son ami Lazare.

Et après avoir prié il crie d’une voix forte : « Lazare, viens dehors »

Et le mort sortit, les pieds et les mains liés de bandelettes, le visage enveloppé d’un suaire.

« Déliez-le et laissez-le aller », continue Jésus.

Mais ce qui me frappe particulièrement, c’est qu’ici comme chez Ézéchiel on retrouve cette même solidarité entre celui qui ouvre le tombeau et celui qui est dedans.

Je m’explique :

Chez Ézéchiel Dieu est parti en exil avec son peuple.

Ici, dans notre Évangile, Jésus semble avoir accompagné Lazare dans son tombeau.

Pourtant, l’évangéliste dans un premier temps fait tout pour nous dire que Jésus est extérieur à la mort de Lazare.

Alors qu’il apprend que son ami est malade, au lieu de se précipiter, il reste deux jours à l’endroit où il se trouve.

 Il se réjouit même de n’avoir pas empêché cette mort … car en ressuscitant Lazare, il pourra faire un signe qui produira la foi chez les témoins.

Mais arrivé devant le tombeau, entouré de cette foule en larmes, tout ce beau « vernis théologique » bien construit craque.

Jésus lui aussi est bouleversé et se met à pleurer.

Les larmes de Jésus.

Jésus est solidaire de Lazare dans son tombeau.

Jésus est solidaire de cette foule qui pleure face au tombeau fermé.

Jésus pleure avec tous ceux qui pleurent.

Cette solidarité, il la poussera jusqu’au bout.

Jusqu’à se laisser déposer lui-même dans un tombeau.

Les pieds et les mains liés de bandelettes, le visage enveloppé d’un suaire.

Dans l’espérance que pour lui aussi s’appliquera la parole de son Père :

Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter, ô mon peuple.

Frères et sœurs, cette parole est donnée aujourd’hui pour tous ceux qui, d’une façon ou d’une autre, sont enfermés dans leurs tombeaux.

Tombeaux du confinement ou de la quarantaine.

Tombeaux des services d’urgences saturés.

Tombeaux du désespoir pour ceux qui voient leurs projets d’avenir, d’un coup s’effondrer.

Il y a quelqu’un à la porte de nos tombeaux.

Ce quelqu’un, c’est Jésus, le Seigneur.

Et il nous fait à chacun, à chacune une promesse.

Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter.

Quand ? Nous ne savons pas.

Mais ce que nous savons c’est qu’il le fera.

Car il est fidèle.

Ce que nous savons aussi, c’est qu’il n’est pas qu’à l’extérieur de nos tombeaux.

Il est aussi avec nous, dans nos tombeaux.

Pleurant avec nous.

Se réjouissant avec nous.

Le virus de la vie, il nous l’a inoculé.

Et enfin, ce que nous savons aussi, c’est qu’un jour, comme Lazare après sa résurrection, il nous faudra mourir à notre tour.

Réellement mourir, pas symboliquement.

Mais là aussi nous croyons que celui qui est la résurrection et la vie, viendra un jour.

Qu’il ouvrira nos tombeaux.

Qu’il criera d’une voix forte « Viens dehors ».

Alors oui, nous remonterons de nos tombeaux.

Dans la lumière pascale, pour une joie qui n’aura pas de fin.

Amen